O. Laffenêtre, L. Villet, D. Chauveaux, et le groupe TALUS (Bordeaux)
Introduction
La prise en charge chirurgicale optimale des pathologies du tendon calcanéen passe par leur démembrement physiopathologique, que l’école de Saillant a su promouvoir par ses nombreux travaux. Ainsi, concernant les atteintes de l’enthèse, ou enthésopathies, il est fondamental d’analyser l’impact sur le tendon lui-même, et en particulier s’il est le siège de rupture ou de désinsertion partielle. C’est tout l’intérêt des examens complémentaires, échographie et IRM, qui vont permettre au mieux de poser l’indication thérapeutique.
Technique opératoire
En cas d’enthésopathie avec désinsertion partielle Saillant a décrit une technique de plastie de réinsertion trans osseuse du tendon, après excision de la zone pathologique qui fragilise considérablement cet élément. Dans cette technique, l’ancrage trans-osseux se fait au moyen de points. Nous l’avons modifié en assurant cette fixation par une vis d’interférence de 7, 28 mm, ou une clavette de 8 mm toutes deux résorbables. L’intervention se déroule en décubitus ventral, sous garrot placé à la racine de la cuisse. Une incision postérieure expose la totalité du tendon. Il est ouvert médianement dans sa partie distale pour exciser la zone pathologique de l’enthèse et en particulier l’éperon osseux ascendant qui y pousse ; ce premier temps fragilise complètement le tendon et impose un réancrage trans-osseux. Celui-ci se fait dans la zone anatomique qui a été au préalable creusée par une bandelette médiane d’un tiers de la largeur tendineuse, prélevée plus haute et retournée à la manière de Bosworth, mais en avant, pour venir combler la parte de substance laissée par l’excision. La longueur doit en être suffisante pour assurer un enfouissement intra osseux de 30 mm. Un tunnel borgne est préparé sur une broche, calibré à une taille généralement à peine supérieure à celle de la vis ou clavette utilisée. Le transplant, préparé et calibré, est introduit dans le tunnel au moyen de son fil tracteur, préalablement passé dans une broche à chas transfixiante. En tension maximale en léger équin de la cheville, le moyen de fixation est mis en place. Les deux berge de la zone proximale de prélèvement sont suturées, puis la fermeture assurée en deux plans sur un drainage aspiratif. Une immobilisation en équin modéré sans appui pour 6 à 7 semaines est alors mise en place.
Matériel et méthode
Notre expérience concerne 5 interventions pratiquées chez 5 patients d’âge moyen 47 ans revus avec un recul moyen de 13 mois. La douleur et la gêne au chaussage constituaient toujours le motif de consultation principal, associée deux fois à une instabilité de l’arrière-pied. Les constatations per opératoires ont retrouvé 4 fois des adhérences, 4 fois une inflammation, 5 fois une atteinte tendineuse directe et un éperon osseux. À la révision au plus grand recul, 4 patients étaient totalement soulagés, 1 améliorés de manière assez significative, aucun encore douloureux ; tous (100 %) se disaient satisfaits ou très satisfaits. La morbidité est nulle.
Discussion
Malgré une apparente lourdeur, cette technique ne présente pas de difficulté majeure, et est facilement reproductible. Ces résultats sont tout à fait encourageants. Le fait d’utiliser un moyen de fixation résorbable intra-osseux permet à notre avis de rendre cette technique plus fiable, et transmissible aux juniors.
Conclusion
Cette technique très séduisante, est très performante pour traiter les enthésopathies avec désinsertion partielle du tendon calcanéen. Nous n’avons pas encore assez de recul pour choisir entre les deux moyens de fixation que nous avons utilisé, les deux semblant à moyen terme équivalent.