K. Ould Amar, M Etxezaharreta, M Egarnes, Mj Bouloy, C Zekhnini, Jl Rouvillai
Dans certaines interventions chirurgicales dont peut bénéficier le patient drépanocytaire, la préparation transfusionnelle est recommandée en vue de prévenir la survenue de complications périopératoires liées à la maladie. Dans cette prise en charge transfusionnelle, l’échange érythrocytaire préopératoire, habituellement pratiqué, ne fait pas l’objet de consensus quant à son indication dans la chirurgie orthopédique hémorragique. Entre 2000 et 2010, nous avons entrepris d’analyser rétrospectivement les modalités de prise en charge transfusionnelle du drépanocytaire bénéficiant d’une arthroplastie de la hanche au CHU FDF pour situer la place de l’exsanguino-transfusion. Sur une d’une cohorte de 27 patients, on a différencié 2 groupes : Les porteurs du trait drépanocytaire, 10 patients AS (groupe témoin) et les drépanocytaires majeurs, 16 patients HbSS (dont 3 en attente d’intervention), 1 à Hôpital.
I) PATIENTS ET PROCEDURES
Le groupe HbAS (n=10). La moyenne d’âge est à 47.4 ans, Sex Ratio 0.6. On compte 12 procédures : 7 PTHD dont une reprise, 5 PTHG dont 2 reprises. La moyenne du tx d’Hb préopératoire est de 13g/dl. Aucune transfusion préopératoire. En période peropératoire : 3 Transfusions autologues (TAD) et 1 HDNI. La moyenne en pertes sanguines est évaluée à 790 ml nécessitant la transfusion de 3-6 CGR
Le groupe Hb SS/Sbeta-thal (n = 14)
La moyenne d’âge est à 35 ans. Sex Ratio 2.1. On compte 16 procédures, 11 PTHG dont 1 reprise, 5 PTHD dont une reprise. Sur les 14 patients opérés, 11/14 sont polytransfusés (78.5%), 4 immunisations, anti- Fya, S, C, E, M (28.5%), 8/14 (57%) avec des antécédents lourds + ou – transfusés (CVO, CHEST, ulcères de jambe invalidants, défaillance multiviscérale).
III) PRISE EN CHARGE TRANSFUSIONNELLE
1 )Groupe avec exsanguino-transfusion préopératoire (EXT), 5/16 : 31%
Une moyenne d’Hb préopératoire à 8.4 g/dl. Quatre patients sur 5 ont des antécédents (dont 1 seul avec CHEST), 4/5 avec antécédents transfusionnels et 4/5 sont transfusés en fin d’intervention ou en post-opératoire immédiat. Une moyenne de 3 CGR transfusés. On compte 4 complications post-opératoires sur les 5 procédures (80%) : 2 CVO, 2 infections, 1 hématome, une thrombo-phlébite, 2 crises de déglobulisation par hémolyse et 1 transfert en soins intensifs. La seule procédure non compliquée concerne un patient sans antécédents transfusionnels
2) Groupe avec transfusion simple préopératoire (TS), 2/16 : 12.5%
Une moyenne d’ Hb préopératoire à 7 g. Deux CGR sont transfusés en préopératoire, des pertes sanguines entre 1000-1200 ml entraînant une anémie à 5 g nécessitant la transfusion de 4 CGR en per-opératoire. Nous n’avons pas observé de complications post-opératoires dans ce groupe
3) Groupe sans transfusion (NT), 9/16 : 56%
Une moyenne d’Hb préopératoire à 8.5 g/dl. Cinq patients sur 9 avec des antécédents dont 2 CHEST. Six patients ont des antécédents transfusionnels. Les pertes sanguines périopératoires sont évaluées à 860 ml en moyenne. Trois patients sur 9 ont présenté des complications post-opératoires (33%): 2 crises hémolytiques (dont 1 transfert en soins intensifs), une CIVD, ayant nécessité la transfusion de 6 CGR, 6 PFC et du facteur VII. Une moyenne de 4 CGR transfusés en peropératoire pour un tx d’Hb moyen de 6.2 g/dl
IV) DISCUSSION
D’une façon générale, les antécédents liés à la maladie drépanocytaire et en particulier le CHEST syndrom ne semblent pas influencer le choix du régime transfusionnel. Celui-ci n’influence pas non plus la survenue de complications. Dans chaque groupe EXT, TS , NT, on n’observe pas corrélation entre les antécédents du patient et la survenue de complications. En revanche, la notion de polytransfusion est significativement liée à la survenue de complications. On compte 7/16 complications post-opératoires (43%) dont 25% (4) liées à des réactions transfusionnelles hémolytiques. On observe plus de complications chez les patients ayant bénéficié de l’EXT. Plus de la moitié des procédures ont été réalisées sans préparation transfusionnelle avec une transfusion à la demande en peropératoire.
CONCLUSION
Au vu de ces observations, l’exsanguino-transfusion ne semble pas être le meilleur choix pour la prévention des complications post-opératoires. La question du délai entre l’échange et l’acte opératoire doit être discutée. La notion de polytransfusion est un élément péjoratif dans la survenue de complications post-opératoires.
Nous continuons donc à proposer une transfusion simple à la demande, en peropératoire en fonction des pertes sanguines et du chiffre d’Hb pour les patients dont le chiffre préopératoire est >7 g/dl. Dans la décision de transfuser, une attention particulière doit être portée sur le statut immuno-hématologique du receveur (groupe rare, RAI complexe) et donc sur la disponibilité et la compatibilité des produits à transfuser.