M Ehlinger, P Adam, F Bonnomet (Strasbourg)
Les fractures articulaires du tibia proximal sont graves et relativement rares. Le bilan initial est radiologique (standard complété par une TDM) et clinique ce qui permet d’appréhender la gravité (osseuse et tissus mous). Ce bilan permet de classer les fractures et d’orienter la prise en charge thérapeutique.
L’ostéosynthèse par plaque peut être proposée par excès dans chaque type selon Schatzker. Le type I (séparation pure) et le type III (enfoncement pur) peuvent relever de façon plus légère d’une fixation par vis sous un éventuel contrôle arthroscopique. Il ne souffre aucune discussion concernant la nécessité de mise en place d’une plaque pour les types II (séparation-enfoncement), les types IV (composante médiale), les V (bitubérositaire) et les VI épiphyso-métaphyso-diaphysaire) ainsi que pour les fractures bifocales où l’enclouage présente des limites évidentes devant l’existence d’une atteinte articulaire. La discussion va essentiellement porter sur le type de voie d’abord (unique latérale, unique médiale, double, standard ou mini-invasive) et sur le type de plaque à implanter (standard, verrouillé). La littérature est controversée.
La voie classique latérale sous méniscale est le plus souvent utilisée. Il existe son pendant médial sous-méniscal retroligamentaire. L’association des deux peut-être proposée pour les types V et VI. Enfin certains auteurs ont décrit des variantes mini-invasives : latérale, médiale ou double. La technique de réduction doit répondre au déplacement : fermeture de la séparation, relèvement de l’enfoncement stabilisation de la partie métaphyso-diaphysaire. La position de la plaque va dépendre du type de fracture et du type de plaque. Type II : plaque latérale standard ou verrouillée, type IV : plaque médiale ou latérale verrouillée, type V : double plaque standard ou latérale verrouillée, type VI : double plaque standard ou latérale verrouillée. Des variantes ont été publiées telles que l’association d’une plaque verrouillée latérale et d’une fixation externe médiale, la mise en place de plaque standard 3.5 ou d’une plaque tibial distal inversée. Les auteurs arguent une meilleure tolérance cutanée.
Pour les types II la littérature est assez consensuelle : plaque latérale standard ou verrouillée par une voie latérale classique. Pour les types à composante médiale le débat est plus nuancé.
La littérature fondamentale est partagée mais une tendance en faveur des plaques standard se dessinent. Certaines études fondamentales prônent une plaque médiale standard pour les types IV et une double plaque standard pour les types V et VI. Pour les autres auteurs il n’y a pas de différence entre une plaque verrouillée unique latérale et une double plaque standard. Alors quid du verrouillage ? Pour certains il permet une meilleure tenue initiale sans montrer toute fois de différence sur la résistance à la mise en charge. Si le choix verrouillé est fait il semblerait qu’un montage mixte (vis verrouillé + vis standard), des vis verrouillées bicorticales avec un caractère polyaxial soit le plus efficace. Les données cliniques, elles, sont plus en faveur des systèmes verrouillés, mais les études récentes sont plus nombreuses ce qui laisser craindre un biais et un effet mode. Les auteurs rapportent de bons résultats cliniques, un faible taux de complications, des résultats radiologiques stables dans le temps. Techniquement ils soulignent qu’il s’agit d’une chirurgie délicate notamment en min-invasif, que ce type de chirurgie doit être privilégiée lorsqu’il existe une souffrance cutanée et que la mise en place de vis additionnelles en compression est souvent nécessaire pour pallier le caractère mono-axial de vis.
Le débat de l’ostéosynthèse par plaque des fractures complexes du tibia proximal est encore ouvert et loin d’être clos, même si les séries cliniques rapportent de bons résultats radio-cliniques stables dans le temps.