Ph Oger (Versailles)
Depuis une vingtaine d’années, un intérêt croissant a été observé pour la modularité de la tige fémorale. La modularité céphalique apparue dans les années 1970 étant peu contestée, le développement d’implants plus complexes permettant d’adapter la prothèse à l’os en associant différents éléments (tige, métaphyse, col) est apparu initialement comme un progrès. Adaptation à l’anatomie, égalisation des membres inférieurs, chirurgie par voie mini invasive, reprise partielle des implants, stabilité devaient ainsi être plus aisément obtenues.
Depuis 2010, différentes publications font état d’accidents liés à la modularité : fractures d’implants, phénomènes de corrosion au niveau des points de jonction associés à des problèmes de réactions tissulaires déjà bien connus avec les prothèses à frottement métal/métal (ALVAL, pseudo-tumeurs, ostéolyses). Les fractures d’implants sont indéniablement favorisées par un BMI élevé, des cols longs et surtout varus mais, également, les mauvais appuis métaphysaires particulièrement en cas de reprise pour descellement si la trochantérotomie ou la fémorotomie ont mal consolidé. Ces ruptures concernent tous les implants qu’ils soient en chrome/cobalt, titane ou acier, ou association de différents métaux.
La corrosion semble surtout subvenir avec les associations métalliques. Elle est favorisée par un ajustage insuffisant des différents éléments et une impaction incomplète. Adapter des éléments de prothèse en provenance de fournisseurs différents reste dangereux même si les caractéristiques de cônes semblent identiques. Le rôle néfaste d’un nettoyage ou d’un séchage insuffisant des zones de jonction a également été évoqué.
Différents types de corrosion sont décrits :
• corrosion galvanique,
• crevice corrosion,
• fretting corrosion (micro mobilité).
Une soudure à froid des éléments peut également subvenir empêchant ainsi un changement partiel d’implant, ce qui va à l’encontre des avantages allégués de la modularité.
Les effets tissulaires locaux des ions métalliques amènent à effectuer des changements d’implant, ces derniers n’étant jamais simples particulièrement dans les pathologies de type pseudo tumeurs.
La revue du Registre national australien permet de confirmer qu’un implant modulaire a une survie inférieure à celle de l’implant non modulaire dont il est issu (10,6% de reprises contre 6,3% à 10 ans). Le retrait récent (2012) de l’ABG 2 et de la Rejuvenate en est le témoin.
Conclusion.
Les complications observées avec la modularité et confirmées par le Registre australien doivent inciter à la plus grande prudence quant à l’utilisation et au développement de ces implants.
Il paraît absolument essentiel de favoriser le développement du Registre français des prothèses de hanche, les implants modulaires ayant été diffusés en France.