- J Garret, E Harly (Lyon)
1. Epidémiologie
Les fractures de l’extrémité supérieure de l’humérus représentent 5% de l’ensemble des fractures. C’est le troisième site de fracture chez la personne de plus de 65 ans après le poignet et l’extrémité supérieure du fémur. Il y a en moyenne 3 femmes pour un homme. Les fractures 3 et 4 parts représentent environ 50% des fractures de l’extrémité supérieure de l’humérus avec respectivement 36% pour les 3 parts et 12% pour les 4 parts.
2. Technique opératoire
a. Installation : Au bloc opératoire, sous anesthésie générale associée à une anesthésie locorégionale par bloc inter scalénique. Le patient est placé en position ½ assis avec le bras est le long du corps et la main posée sur le ventre tout au long de l’intervention afin d’éviter les troubles de rotations. L’amplificateur de brillance est placé à la tête du patient permettant un contrôle radioscopique de l’interligne gléno-humérale de face.
b. Voie d’abord : Il s’agit d’une voie d’abord supéro-externe trans deltoïdienne, limité en haut par l’acromion et par le nerf axillaire qui chemine à la face profonde du deltoïde environ 4 cm sous l’acromion et qui est repéré au doigt. Après bursectomie partielle, cette voie d’abord donne un accès simple et direct au foyer de fracture inter-tubérositaires mais elle ne permet pas l’accès à la diaphyse humérale. Le trait de fracture inter tubérositaires aura été soigneusement étudié sur les coupes TDM axiales et les reconstructions 3D de bilan radiologique pré opératoire, il passe le plus souvent à travers le trochiter en dehors de la gouttière bicipitale. Des fils tracteurs sont placés à la jonction os/tendon au niveau du trochiter et au niveau du trochin.
c. Réduction : La réduction de la tête humérale sur la glène s’effectue à l’aide d’une spatule et d’un chasse greffon. La tête humérale elle est le plus souvent basculée en arrière et en valgus. S’il persiste une charnière céphalo-tubérositaire interne (« cortical medial support »), la tête humérale est le plus souvent stable et ne justifie pas de stabilisation per opératoire temporaire. En revanche l’absence de charnière cephalo tubérositaire interne nécessite le plus souvent de stabiliser temporairement la tête humérale par une broche d’arthrodèse temporaire qui sera enlevée en fin d’intervention.
Le point clé de l’intervention consiste à réduire anatomiquement les tubérositées et particulièrement le trochiter sous son auvent sous acromial. Plus que l’évolution secondaire de la tête humérale en cas de fracture 3 ou 4 parts et son risque d’ostéonécrose, le pronostic fonctionnel des fracture complexe est lié à la consolidation en position anatomique des tubérosités. Celles ci apparaissent le plus souvent déplacées comme un « livre ouvert ». Le repérage per opératoire de critères de réduction permet le plus souvent une réduction anatomique qui est maintenue par un davier.
d. Ostéosuture : L’ostéosuture inter tubérositaire maintient l’épiphyse supérieure de l’humérus et transforme une fracture complexe 3 ou 4 parts en une fracture 2 parts du col chirurgical. L’ostéosuture inter tubérositaire laisse la gouttière bicipitale libre quand il existe un fragment osseux suffisant à la partie latérale de la gouttière bicipitale, permettant le passage de fils trans osseux. Dans cette situation on note la présence d’un « oméga » sur les coupes TDM axiales (trochin + gouttière bicipitale + fragment de trochiter). Dans notre expérience, la conservation de la gouttière bicipitale est un élément qui participe à la stabilisation de la fracture. Quand le fragment osseux de la partie latérale de la gouttière bicipitale est absent ou comminutif, l’ostéosuture inter tubérositaire doit passer en pont par dessus la gouttière bicipitale réalisant ainsi une ténodèse et justifiant alors d’une ténotomie de la longue portion du biceps. Dans ces cas, on ne retrouve pas « d’oméga » sur les coupes TDM axiales.
e. Enclouage : Le clou Telegraph FH Orthopedics est droit et fin de diamètre 7 mm. Son point d’entrée se situe au niveau du point particulier en zone cartilagineuse à la partie supérieure de la tête humérale en avant et en dehors du sommet de la tête humérale respectant l’offset latéral et postérieur. Le « foot print » du trochiter correspondant à la zone d’insertion des tendons de la coiffe des rotateurs est une zone à préserver. L’utilisation d’un clou droit préserve le « foot print » alors qu’il est endommagé par l’utilisation d’un clou béquillé.
La trépanation osseuse est réalisée avec des pointes carrées croissantes, jusqu’au passage d’un alésoir de diamètre 7mm. Un clou Telegraph FH orthopedics de 7 mm est introduit délicatement manuellement sans marteau. L’introduction du clou ne démonte pas la réduction épiphysaire sous réserve qu’une broche temporaire dite de « crucifixion » soit placée s’il n’y a plus de charnière cephalo tubérositaire mediale. La pénétration intra osseuse doit être complète avec un repérage soigneux sous contrôle scopique.
L’utilisation d’un clou droit permet d’orienter « à la demande » la position des vis de verrouillage épiphysaire afin de les placer dans une zone où l’os tubérositaire est de bonne qualité sans comminution. L’utilisation de 4 vis divergentes, de faible diamètre (3,5mm) , autostables dans le clou stabilisent efficacement l’épiphyse.
L’utilisation d’un clou centro médullaire réduit la diaphyse humérale sous l’épiphyse sans aborder la diaphyse.
f. Verrouillage distal : Les fractures extra-articulaires sous tubérositaires nécessitent un verrouillage distal dynamique pour stabiliser la fracture en rotation. Le verrouillage dynamique prévient le risque de pseudarthrose du col chirurgical. Les fractures articulaires sont stables en rotation et ne nécessitent pas de verrouillage distal.
3. Avantages
- Il s’agit d’une technique standardisée et reproductible dont l’objectif est de garantir une reconstruction anatomique de l’épiphyse supérieure de l’humérus et particulièrement le trochiter par une voie d’abord direct antéro supérieure trans deltoidienne.
- L’utilisation d’un clou droit et fin évite les lésions iatrogènes des tendons de la coiffe des rotateurs et permet de placer les vis épiphysaires à la demande où on le souhaite.
- Un clou centro medullaire est peu encombrant et les vis autostables divergentes assurent une bonne stabilité de l’otéosynthèse.
- Ce matériel peut être enlevé sous arthroscopie et permet de réaliser une arthrolyse gléno humérale par libération sous acromial et libération de l’intervalle de la coiffe des rotateurs avec résection du ligament coraco huméral.